Martine

Là, tu te dis « Ouha, un blog qui épingle quelqu’un en particulier !!! Horreur, ça ne se fait pas !!! ». Mais, pas de panique lecteur, j’ai la situation bien en mains, t’inquiètes.

Par contre, je ne peux pas consciemment laisser le monde dans l’ignorance d’un fléau sournois qui sévit depuis tant d’années.

Parce que oui, cher lecteur, Martine n’est pas un prénom, comme tu peux naïvement le croire, ni même un nom de code ou un pseudo (pour les plus jeunes d'entre toi qui lis ce blog). Non ! Martine est une espèce à part entière. Et attention, subtilité ! Il y a des Martine qui ne sont pas des Martine alors que d'autres ne sont pas des Martine alors qu'en fait se sont les pires des Martine !

Tu me suis ? Oui ? Non ? Pas grave, je vais essayer d'éclairer ta lanterne.

La cinquantaine bien tassée, surfant sur les vagues souvenirs d’une gloire physique depuis longtemps déjà sacrifié au champ du déshonneur capillaire et esthétique de « moins ou moins » bon goût, persuadé que tout ce qu'elle s'achète comme fringue rende aussi bien sur elle que sur le mannequin anorexique du catalogue (et accessoirement cadette de pas moins de 35 ans), pense que parler de cul comme les caricatures de chauffeur routier c'est cool et ça fait libéré, ne peut s'empêcher de se tartiner chaque matin de l'équivalent maquillage annuel du cirque Pinder et n'a toujours pas compris que l'eau de toilette ne vient pas en remplacement de l'eau pour la toilette.

Et maintenant que tu as lu cette brève description inesthétique, tu es en train de te dire que merde, toi aussi tu en as une (si tu as de la chance) ou plusieurs (si comme moi tu n'as pas de chance) autour de toi au boulot. Mais une telle révélation peut désarmer même le plus brave d'entre toi et le doute peut s'immiscer en toi. Alors, laisse moi maintenant te décrire son mode opératoire au « travail » (mot bien mal choisi à la vue de ce que je vais écrire maintenant).

Forcément, la Martine a un poste à hautes responsabilités. C'est bien simple, sans elle, la boite ne peut tout simplement pas tourner, d'où les avantages en nature qu'elle s'octroie de bonne grâce pour se remercier de faire don de ses talents à l'entreprise sur laquelle son dévolu s'est abattu. Lorsque, chaque matin, qu’il pleuve, neige ou vente, tu traverses la moitié de la ville pour rallier ta place de stationnement gratos (si t'as du bol) à ton bureau en open-space (parce que ça fait « states » de bosser dans un environnement à 135 décibels où l'intimité a été réduite à sa plus simple expression pour que tu produises plus de merde inutiles que de raison), elle, elle aura sa place de parking réservée à grands frais par le patron en personne à qui elle aura soigneusement bourré le mou pendant des semaines pour l'obtenir. Parce que oui ! La Martine est très souvent secrétaire de DI-REC-TION !

Mais, qu'à cela ne tienne ! Tu peux encore te dire que bosser en direct avec le boss, c'est chaud et que vu les exigences du personnage (envoyer un courrier, tenir un planning à jour, parfois même préparer un café en vue d'une réunion importante), il se peut qu'elle soit soumise à tant de pression que la moindre des choses de la part du chef est de lui offrir un « petit » avantage en nature.

Soyons franc, qu'est ce que tu apportes à ton boss toi, hein ??? 5, peut-être 10% de son chiffre d'affaire ? Tu vas certainement dire que tu ne comptes pas tes heures et que tu te donnes corps et âme à ta boite... Mais la Martine en fait autant, brave lecteur !

Elle aussi ne compte pas ses heures, de peur de mettre en évidence son absentéisme indécent.

Elle aussi fait entre 5 et 10% du chiffre d'affaire ! Bon d'accord c'est le CA de l'entreprise de fournitures de bureau... Mais quand même, elle œuvre au maintient dans l'emploi précaire des emplois intérimaires alors que toi, avec ton obscène CDI, tu te pavanes de boite en boite pour refourguer les merdes de ton patron.

Et maintenant, je suis sûr que tu es abattu devant toute l'ampleur de la petitesse de ta personne, non ? Tu dois te dire « Mais pourquoi ne suis-je pas né Martine ??? POUR-QUOIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII... » ton cri s'éteignant dans le lointain.

Tout simplement parce que la nature humaine est cruelle, brave lecteur abattu.

Estimes toi heureux que la Martine te porte un peu d'attention, voir qu'elle te fasse du rentre dedans. Oui, là je m'adresse aux plus jeunes de toi. Ceux de toi qui viennent d'arriver dans le monde du travail et pense avoir trouvé en la Martine, une sorte de seconde maman bienveillante, qui t'aiguille dans tes démarches et te donnes tout un tas de conseils off sur tout et tout le monde alors qu'au plus profond de toi, tu te demandes déjà ce qu'elle pourra dire de toi lorsque la prochaine cargaison de stagiaire-intérimaire-emploi-d'avenir arrivera et qu'elle posera ses griffes acérées sur eux pour leur faire découvrir le « monde magnifique du travail en entreprise ».

Oh, là, je sais que tu échafaudes déjà un plan pour contrecarrer la Martine. À base de témoignages, de relevés de téléphone (oui, la Martine est très friande des technologies de communications payantes – les mails, de toutes façon, elle ne sait pas comment ça marche et ça l'emmerde d'apprendre parce que de son temps, y en avait pas besoin) ou encore de rapportage de faits au boss.

N'y penses pas malheureux lecteur ! La Martine aura toujours le dernier mot sur toi pour la simple est bonne raison qu'elle n'a que ça à foutre de causer avec le boss quand il s'emmerde (ce qui doit arriver du moment où il arrive jusqu'au moment où il se casse – pause déjeuner déduite – puisque tu es sous payé pour faire tourner sa boite!). Et généralement, le boss ayant recruté la Martine depuis ses débuts, est encore sous l'effet du charme qu'elle avait du avoir lors de son incorporation à 16-18 ans et bande toujours à l'idée de se soulever en 5 à 7, en évitant de regarder la photo de bobonne et des mioches, maintenant devenus cadres sup de ta boite sans avoir jamais rien glandé pour obtenir de telles responsabilités.

Et là, je lis dans tes yeux humides de larmes de colère et d'injustice tout l'absurdité et le désarroi que moi même je ressens depuis tant d'années. Et à ceci je ne peux que t'opposer une seule petite compensation... Viens te faire plaisir sur ce blog, il est tout à toi pour que toi aussi tu témoignes du diktat de la Martine en milieu professionnel hostile. A défaut de changer le monde, tu te feras du bien (crois moi sur parole, ça soulage) et tu tireras peut-être d'un lecteur un sourire complice.

Rejoins nous !

L'emmerdeur